.....
Cela aurait pu être l'histoire d'un
vilain petit canard qui en devenant grand…se transforme en cygne,...
mais c'est surtout l'histoire d'un poney qui n'en a pas, qui n'attire
pas exagérément l'attention, et qui prouvera que sa beauté à lui,
elle est toute intérieure !
…Bref retour aux sources…
Au début de la reconnaissance
officielle de la race en 1972, tous les poneys pottok qui ont été
inscrits l'ont été à titre initial.
Ceci n'a rien de déshonorant, c'est
juste une réalité. L'histoire de la race vous a montré dans quelles
conditions cela a pu se faire. Il fallait à l'époque comparer des
poneys vivant dans un milieu, avec un standard de race qui venait
d'être établi ; si la comparaison entre ces deux points de vues
"coïncidait " le poney était inscrit à titre initial. Aucune généalogie
ne pouvait être prise en compte dans la mesure où la plupart du
temps ces poneys naissaient libres sur les plateaux des montagnes
basques. Les étalons et les juments pottok sans autres formalités
administratives perpétuaient ainsi la race depuis des lustres. (
toutes les races ont eu les mêmes débuts ! . Inutile d'accuser les
pottok d'illétrisme ou "les Basques " de séparatisme, il est plus
utile de prendre en compte les spécificités régionales, …à ce titre
la plupart des étalons pottok n'auraient pu remplir une déclaration
de premier saut qu'en langue basque et l'administration ne leur
a toujours fourni que des documents officiels imprimés en français…).
Le temps et le hasard font souvent
les rencontres…ensuite il faut bien souvent pour qu'un poney
rentre dans "l'histoire ", qu'un homme s'en occupe ou que le chemin
de l'un et de l'autre se croisent.
Jean baptiste Halty vivait sur la
commune d'Espelette, et la ferme d'Armanénia est connue au pays
basque pour diverses raisons ; la première est culturelle, La seconde
est qu'en ces débuts d'années 70, outre le fait qu'il soit un membre
militant pour la reconnaissance de la race pottok, Monsieur Halty
est aussi courtier en chevaux. Enfin et s'il fallait d'autres raisons,
la ferme d'Armanénia a une activité soutenue à cette époque, elle
abrite en ses murs une station de monte des Haras Nationaux, un
poney-club "Ichtaklok ", elle est aussi le siège de la toute jeune
association du national du pottok et elle le restera pendant de
nombreuses années.
C'est pour ces différentes raisons
que M. Halty a de nombreux contacts au pays basque, qu'il parcourt
de nombreux kilomètres et enfin qu'il achète des poneys pour le
développement de son propre élevage.
Pourtant si le bonheur est bien
dans le pré, il n'est pas forcément nécessaire d'aller courir très
loin, M. Halty va le trouver un matin ; en face de chez lui en 1977.
Au mois de mai de cette année là un poulain pie bai est né chez
Marie "d'Apetxiea " (du nom de la maison…), (au pays basque les
propriétaires portent ou sont souvent appelés par le nom de leur
maison). Monsieur Halty s'en porte acquéreur, sans plus attendre.
Il sera inscrit à titre initial
au livre généalogique pottok livre A et sera baptisé Lhaun,
"copain " en langue basque. Il sortira plusieurs fois en
concours d'élevage, (par la force des choses et pour être approuvé
étalon). Parmi ses résultats il est possible de signaler qu'il fut
1er du concours d'aptitude à la selle et à l'obstacle en juillet
1981, 4ème en modèle et Allures au concours des étalons en 1985.
Il ne sera agréé qu'à titre provisoire
par les fins spécialistes de la race et les Haras Nationaux, pendant
les premières années de sa carrière de reproducteur ; cet agrément
sera reconduit pendant plusieurs années consécutives ; et ses premiers
poulains naîtront en 1982.
Il faut reconnaître et d'ailleurs
Armand Halty est aujourd'hui le premier à le faire que : " Lhaun
péchait par ses jarrets, il était cylindrique, et il avait un dos
qui aurait gagné à être un peu plus court" (bref il n'était pas
LE père idéal, l'améliorateur de modèle …en ces années là tant recherché).
Quoi qu'il en soit, Lhaun avait
les qualités de ses défauts il était fait en poney de sport ( et
il ne s'agit pas là pour ma part) d'un commentaire en forme de voie
de garage…mais bel et bien d'un compliment ! . Si ce poney avait
des qualités ; il fallait les chercher autre part que dans son modèle
! .Ses résultats sportifs feront la preuve (à eux seuls) que les
"défauts potentiels " que tout juge lui a trouvés n'ont jamais handicapé
ce poney pour obtenir des résultats sportifs de haut niveau. Il
serait peut être temps que les juges, peu ou pas compétents, (sans
compter les impressionnables et les arbitraires) cessent de regarder
les pottok en tentant de les faire rentrer dans un moule unique,
(alors que l'on sait pertinemment qu'il existe différents types
de pottok), et qu'ils ouvrent enfin les yeux ou définissent d'autres
critères d'évaluation (et qui sont eux aussi transmissibles) pour
enfin prendre en compte des poneys qui sont capables de rendre de
grands services à la race.
Toutes les hésitations des juges
quant à l'appréciation de son modèle furent vaines, inutiles et
non justifiées ; et il aura fallu toute la ténacité et le courage
du fils de M. Halty (Armand) (après le décès de son père en février
1985), pour passer outre ces appréciations et persévérer à utiliser
un poney dans son élevage en tant que reproducteur.
Grâce ou à cause de ces jugements
? …, toujours est-il que parallèlement à ses activités de reproducteur
en mars 1985, Lhaun débute une carrière en compétition de concours
complet d'équitation sous la selle de Karine Malou du poney-club
de Ondre (dép.40).
L'aventure en compétition équestre
durera trois ans, de mars 1985 à juillet 1988.
Armand Halty se souvient : " Lhaun
était un poney formidablement gentil, (qualité qu'il a transmise
à sa production !)…au début c'était un peu pour voir que nous sortions
en compétition, … pendant la saison de concours (de février à juillet)
Lhaun était avec ses juments du lundi au samedi, il y faisait
la monte en liberté ; et le dimanche nous l'amenions sur les terrains
de concours complet, là stoïque il faisait son parcours avant
de rejoindre ses juments le soir au retour aux écuries… "
Il faut croire que si la méthode
peut paraître surprenante,…, ce poney en se comportant ainsi, a
fait la démonstration qu'il était bien dans sa tête ! car seuls
ceux-là peuvent aussi remarquablement bien gérer leur énergie.
Lhaun en tout cas œuvrait sans problèmes sur les deux tableaux.
La "méthode " en question a porté ses fruits car il fut qualifié
plusieurs fois pour le championnat de France poney …après s'être
qualifié et donc après avoir remporté un nombre important de classements
en concours.
Plus fort (que jamais) et
toujours plus loin (du pays basque), enfin toujours plus
haut (sur le podium)…il ne laissera à personne d'autre le soin de
s'emparer du titre de champion de France 1988, en concours complet
en classe C et en 1ère série, monsieur s'il vous plaît !
Carrière sportive rondement menée
car obtenir un tel titre en si peu d'années de compétition, prouve
bien la qualité intrinsèque du poney.
Malheureusement après un mois de
juillet triomphant Lhaun sera victime de coliques au mois de décembre
de la même année. Sa disparition de la scène publique sera prématurée,
… . Terrible revers, perte inestimable pour son propriétaire
et pour la race !
|
Alizée de la Nive ( Lhaun
et Merkéda )
|
Mais heureusement (et malgré la
surprenante gestion de carrière évoquée plus haut), Lhaun n'était
pas seulement bon le dimanche, il a aussi engendré parallèlement
à ses activités sportive …53 produits, dont 36 femelles, et 17
mâles. Sur ces 17 mâles, six deviendront étalons et trois (au
moins) seront castrés. (* aux dires d'Armand Halty : 100% des juments
qui étaient confiées à Lhaun engendraient un poulain l'année suivante)
Dans sa brève carrière Lhaun
aura transmis sa " graine de champion " de façon régulière, puisque
19 de ses produits seront indicés à plus de 100 …soit plus de 35%
de sa production, dont Babyjus I.P.C 119 (98) qui obtiendra le titre
suprême de champion de France en 1997 ( CCE / D2), mais on peut
aussi nommer entre autres : Vague de la Nive avec un I.P.C 143 en
poney, un I.P.O de 147 pour Titilde de la Nive et encore un I.P.D
de 133 pour Rêveuse,...
Quant au mot de la fin je le laisserai
à Armand Halty :
" Aujourd'hui j'élève des pottok
au pays basque, parce que cela me semble naturel, …et finalement
je reconnais que mon père était un avant gardiste, dans sa façon
de concevoir que pour être un bon poney : il fallait que celui-ci
en fasse la démonstration, …par son utilisation et ses résultats
"
Quand vous osez lui demander : et
pour vous c'est quoi un bon pottok ? , la réponse fuse :
" Un bon pottok c'est un pottok
qui peut être utilisé par tous. Au poney-club (Niv'au galop club)
nous avons 250 adhérents, dans la cavalerie il y a des produits
de Lhaun et sur 27 poneys, seulement 8 ne sont pas des pottok !
. Nous recevons des individuels mais aussi des enfants de la protection
et de la sauvegarde de l'enfance, des enfants handicapés, des enfants
autistes… un bon pottok c'est un pottok qui convient au plus grand
nombre. La race est formidable ! Une de ses grandes qualités c'est
qu'il y ait en son sein une grande gamme de poney et que le pottok
est vraiment un poney polyvalent… Le malheur dans ce pays c'est
qu'il faudrait dresser les Basques (les éleveurs ) avant de dresser
les poneys ! "
J'ai le sentiment après une heure
d'entretien, que l'une de vos motivations en créant ce poney-club
fut de transmettre les messages que la vie et la compétition avaient
pu vous apprendre, et de faire partager votre passion pour cette
race.
En prenant congé, je croise les
sourires ravis des enfants qui finissent leur reprise, témoignage
idéal qui prouve que votre message est compris.
Je repars satisfait que nos chemins
se soient croisés. Merci de m'avoir accordé un peu de votre temps.
Propos recueillis le 04.01.2001
PUBERT Christian.
Les chiffres cités sont "arrêtés"
à la date de rédaction.
|